Alors que je ne maîtrisais pas encore bien les règles, j’avais été incité par un ami à jouer de l’argent sur un site de poker en ligne fin 2003. Je pensais que si deux joueurs avaient une couleur et qu’il y avait un As de cette famille – les piques par exemple – au tableau, ils partageaient forcément le pot. J’ai probablement « bluffé » quelques personnes qui n’avaient pas la couleur max en poussant allègrement mon tapis, mais j’ai fini par être payé par un joueur qui avait le Roi de pique.
Je n’ai alors pas du tout compris pourquoi j’avais perdu. Cela m’a aidé à saisir comment on formait une combinaison ! Vérité immuable : on apprend de ses erreurs et il faut toujours payer pour cela – plus ou moins longtemps et plus ou moins d’argent, certes. Une fois les règles bien assimilées, c’est l’importance du lien entre la position et la valeur nominale d’une main qui m’a valu des déboires. J’estimais par exemple que Q-10 était une main forte. Le fait est qu’elle n’a assurément pas la même valeur en position précoce qu’au bouton. Seul le flop qui allait être découvert comptait à mes yeux. Je me trompais lourdement. Je jouais aussi tous les tirages sans me soucier des cotes au pot, des cotes implicites et de l’équité.
Avec 7-8 à coeur sur un tableau affichant A-K-2 avec deux cartes à coeur, je payais toutes les relances, au flop et au turn, quel qu’en soit le montant. Les cotes implicites sont pourtant essentielles sur le plan financier. Sur le long terme, en tirant une couleur hauteur Huit, on perdra plus d’argent qu’on en gagnera. Car soit l’adversaire aura une couleur de force supérieure, soit il ne payera rien une fois la couleur tombée. Le rapport entre les risques et les gains potentiels doit donc être bien calculé – du moins globalement estimé.
Sur le plan théorique, j’ai beaucoup appris en questionnant et en observant des bons joueurs, en particulier des amis canadiens, qui gagnaient beaucoup d’argent sur PokerStars en 2004. Ils m’ont expliqué les erreurs que je faisais et que j’étais susceptible de faire. À l’époque, les méthodes d’apprentissage et les vidéos pédagogiques n’existaient pas. La transmission orale tenait donc une place de choix. Pour progresser, il fallait connaître des bons joueurs et/ou apprendre par soi-même – ce que j’ai aussi beaucoup fait. Cinq mois après avoir débuté au poker, j’avais des bases correctes et j’ai commencé à gagner de l’argent dans des parties à 2$/4$, la troisième plus grosse limite à l’époque, où le niveau moyen était beaucoup plus bas qu’aujourd’hui.