Tout joueur de poker un peu sérieux dispose de sa recette personnelle pour plumer les « pigeons » – le mets le plus juteux qui puisse être servi à la table. Apprendre à le capturer sans l’effrayer est tout un art, résumé ici en quatre points.
À la question « Combien puis-je gagner par heure dans une partie à 2 $/4 $ ? », j’ai toujours du mal à donner une réponse, tant elle dépend du niveau de celui qui m’interroge. Personnellement, j’estime que mon gain horaire est directement lié à la somme des tapis des « pigeons » présents à ma table. Il suffit, en général, de quelques orbites pour identifier mes cibles : les pigeons entrent dans presque tous les coups, ils aiment limper et suivent volontiers les relances.
À dire vrai, ils donnent généralement l’impression de terminer au casino un séjour à Las Vegas où ils se seraient rendus pour une toute autre raison que le poker… Une partie avec quatre pigeons ayant chacun un tapis de 500 $, et une partie avec deux pigeons ayant chacun 1.000 $ seront à peu près aussi profitables l’une que l’autre. Celle avec quatre pigeons le sera probablement un peu plus, car l’argent sera réparti en un nombre moins importants de bons joueurs. C’est contre ces pigeons que je maximiserai mes gains. Mon objectif sera de m’emparer de leurs tapis. Voici ma recette.
# 1 Gonfler les pots préflop et isoler le pigeon
Quand un pigeon limpe préflop, je relance. Surtout si j’ai la position et que ma relance permet de me retrouver au flop en tête-à-tête, voire à trois joueurs. J’envisagerai de relancer avec la plupart des mains jouables comme Kx8x assortis, Jx9x assortis, des paires supérieures aux 6, etc. Je me contenterai rarement de limper après un pigeon.
Pourquoi constituer un pot préflop ? Principalement pour augmenter les enjeux. Dans une partie à 2 $/4 $, si je limpe à mon tour au bouton, je disputerai probablement un pot de 20 $ à quatre joueurs. Si je relance à 25 $ préflop, je disputerai un pot à 57 $ en tête-à-tête ou un pot de 77 $ à 80 $ à trois joueurs. Or les mises post-flop sont plus importantes si le pot est plus gros. Et, puisque je peux m’attendre à ce que le pigeon effectue de mauvaises relances post-flop, je souhaite qu’elles soient aussi importantes que possible.
Je me contenterai rarement de limper après un pigeon.
À deux exceptions près : si le pigeon possède un petit tapis (je risquerais alors de manquer de marge de manœuvre pour effectuer mes mises au flop, au turn et à la rivière) ou si j’ai une main marginale contre un joueur capable de faire tapis si le pot a été limpé. Autrement, je considère qu’il est profitable de gonfler le pot, et je relancerai donc le plus souvent préflop – surtout avec la position.
# 2 Pensez à l’overbet
Après avoir constitué un joli pot préflop, l’overbet post-flop est l’outil le plus puissant pour prendre le tapis d’un pigeon. Contre une mise supérieure au pot, les joueurs resserrent en général leur panel. Mais pas les pigeons. Ne lisant pas très bien les mains et ayant recours à d’étranges raisonnements, ils suivront souvent un overbet. Vous touchez votre couleur à la rivière ? Allez-y ! Faites un overbet massif.
L’overbet post-flop est l’outil le plus puissant pour prendre le tapis d’un pigeon
Les bons joueurs flaireront le danger, mais les pigeons s’engouffreront avec des quintes, brelans, deux paires voire une paire max seulement. Si vous avez un brelan sur un tableau hauteur As, effectuez de fortes relances. Il se pourrait que vous soyez suivi par un pigeon détenant un As. Peut-être que les joueurs décents à votre table sauront ce que vous faites, mais pas le pigeon, et c’est tout ce qui compte.
# 3 Évitez les coin flips
La plupart des débutants qui doivent jouer un coin flip tendent à se coucher trop vite. Pourtant, contre un pigeon, je conseille d’éviter ces coin flips. Pourquoi ? Parce que souvent les pigeons ne se recavent pas après avoir perdu tout leur tapis. Or avec un pigeon en moins, la partie devient tout de suite moins profitable. Certes, l’objectif reste de s’emparer de son tapis, mais contre un pigeon, restez patient et vous trouverez une occasion où vous aurez l’avantage. Inutile de vous précipiter à jouer un coup à pile ou face.
Sous-jouer aussi vos tirages. Un coup à tapis avec un tirage couleur doit avoir un peu de fold equity pour être profitable. Si vous êtes payé, vous aurez probablement une cote défavorable. Contre le pigeon, vous aurez moins de fold equity ; le bluff marchera moins souvent contre lui que contre un joueur « normal ». Qui plus est, vous aurez la possibilité d’effectuer un overbet si vous touchez votre main. Plutôt que de donner au pigeon une trop bonne occasion de tenter un coup, slowplayez et attendez une situation où vous le plumerez avec un overbet.
# 4 Soyez agréable
Sans avoir à faire le fanfaron, participez aux discussions et essayez de vous amuser. Si la plupart des pigeons savent qu’ils vont tout perdre, ils feront tout pour ne pas céder leur dernier dollar à un type qu’ils n’apprécient pas. Ne prenez donc personne de haut. Ne soyez pas trop à cheval sur les règles. N’ignorez pas ceux qui vous adressent la parole à moins que vous ne soyez engagé dans un coup et ne critiquez pas trop le croupier. Si vous tenez à porter une capuche ainsi que des lunettes de soleil et à écouter votre iPod, assurez-vous de retirer vos écouteurs de temps en temps pour rire à une bonne blague. Si vous êtes aimable, les pigeons vous apprécieront et paieront plus volontiers vos mains fortes.
Les pigeons ne sont pas idiots. Ils jouent juste pour des raisons différentes des vôtres. Ils veulent dépenser un peu d’argent et, peut-être, en gagner une fois de temps en temps. Surtout, ils veulent passer du bon temps et affronter des adversaires amicaux. Ayez du respect pour eux. C’est la base de ma recette avec les axes suivants : relance préflop, contrôle du pot post-flop dans les situations marginales et overbets massifs si vous savez que vous avez l’avantage. Vous aurez alors toutes les chances de plumer votre pigeon.